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la question du désir

L’histoire du peuple hébreu, dont les désirs se sont cristallisés autour d’une terre, d’un roi et d’un temple, est une succession de drames. Les causes de ces crises, les problématiques rencontrées résonnent étrangement avec notre actualité. De crise en crise, les objets du désir se métamorphosent.

En tirant le fil du thème du désir, le déroulement de l’histoire biblique apparaît comme une longue gestation qui conduit le peuple à élargir son désir et à s’ouvrir à de nouvelles perspectives.
Les objets premiers de son désir deviennent alors des symboles qui permettent d’appréhender une réalité que la raison et la science seules ne peuvent circonscrire.
Dans cet élargissement du champ du possible, le plaisir de la possession et la jouissance de maîtriser son destin laissent la place à la joie de l’inattendu, à l’inouï.




Lettre du Pape François

Chers amis,

Je pense souvent à nos rencontres : deux au Vatican et une à Santa Cruz de la Sierra et je vous avoue que ce « souvenir » me fait du bien, me rapproche de vous, me fait repenser à tant de discussions partagées durant ces rencontres et aux nombreux projets qui en sont nés et y ont mûri, et dont beaucoup sont devenus réalité.
Aujourd’hui, en pleine pandémie, je pense particulièrement à vous et je tiens à vous dire que je suis à vos côtés.

En ces jours de grande angoisse et de difficultés, nombreux sont ceux qui ont parlé de la pandémie dont nous souffrons en utilisant des métaphores guerrières. Si la lutte contre le COVID-19 est une guerre, alors vous êtes une véritable armée invisible qui combattez dans les tranchées les plus périlleuses. Une armée sans autres armes que la solidarité, l’espoir et le sens de la communauté qui renaissent en ces jours où personne ne peut s’en sortir seul. Vous êtes pour moi, comme je vous l’ai dit lors de nos rencontres, de véritables poètes sociaux qui, depuis les périphéries oubliées, apportez des solutions dignes aux problèmes les plus graves de ceux qui sont exclus.

Je sais que très souvent vous n’êtes pas reconnus comme il se doit, car dans ce système vous êtes véritablement invisibles. Les solutions prônées par le marché n’atteignent pas les périphéries, pas plus que la présence protectrice de l’État. Vous n’avez pas non plus les ressources nécessaires pour remplir sa fonction. Vous êtes considérés avec méfiance parce que vous dépassez la simple philanthropie à travers l’organisation communautaire, ou parce que vous revendiquez vos droits au lieu de vous résigner et d’attendre que tombent les miettes de ceux qui détiennent le pouvoir économique. Vous éprouvez souvent de la colère et de l’impuissance face aux inégalités qui persistent, même lorsqu’il n’y a plus d’excuses pour maintenir les privilèges. Toutefois, vous ne vous renfermez pas dans la plainte : vous retroussez vos manches et vous continuez à travailler pour vos familles, pour vos quartiers, pour le bien commun. Votre attitude m’aide, m’interroge et m’apprend beaucoup.

Je pense aux personnes, surtout des femmes, qui multiplient le pain dans les cantines communautaires, en préparant avec deux oignons et un paquet de riz un délicieux ragoût pour des centaines d’enfants ; je pense aux malades, je pense aux personnes âgées. Les grands médias les ignorent. Pas plus qu’on ne parle des paysans ou des petits agriculteurs qui continuent à travailler pour produire de la nourriture sans détruire la nature, sans l’accaparer ni spéculer avec les besoins du peuple. Je veux que vous sachiez que notre Père céleste vous regarde, vous apprécie, vous reconnaît et vous soutient dans votre choix.

Comme il est difficile de rester chez soi pour ceux qui vivent dans un petit logement précaire ou qui sont directement sans toit. Comme cela est difficile pour les migrants, pour les personnes privées de liberté ou pour celles qui se soignent d’une addiction. Vous êtes là, physiquement présents auprès d’eux, pour rendre les choses plus faciles et moins douloureuses. Je vous félicite et je vous remercie de tout mon cœur. J’espère que les gouvernements comprendront que les paradigmes technocratiques (qu’ils soient étatistes ou fondés sur le marché) ne suffisent pas pour affronter cette crise, ni d’ailleurs les autres grands problèmes de l’humanité. Aujourd’hui plus que jamais, ce sont les personnes, les communautés, les peuples qui doivent être au centre de tout, unis pour soigner, pour sauvegarder, pour partager.

Je sais que vous avez été privés des bénéfices de la mondialisation. Vous ne jouissez pas de ces plaisirs superficiels qui anesthésient tant de consciences. Et pourtant, vous en subissez toujours les préjudices. Les maux qui affligent tout un chacun vous frappent doublement. Beaucoup d’entre vous vivent au jour le jour sans aucune garantie juridique pour vous protéger. Les vendeurs ambulants, les recycleurs, les forains, les petits paysans, les bâtisseurs, les couturiers, ceux qui accomplissent différents travaux de soins. Vous, les travailleurs informels, indépendants ou de l’économie populaire, n’avez pas de salaire fixe pour résister à ce moment… et les quarantaines vous deviennent insupportables. Sans doute est-il temps de penser à un salaire universel qui reconnaisse et rende leur dignité aux nobles tâches irremplaçables que vous effectuez, un salaire capable de garantir et de faire de ce slogan, si humain et chrétien, une réalité: pas de travailleur sans droits.

Je voudrais aussi vous inviter à penser à « l’après », car cette tourmente va s’achever et ses graves conséquences se font déjà sentir. Vous ne vivez pas dans l’improvisation, vous avez une culture, une méthodologie, mais surtout la sagesse pétrie du ressenti de la souffrance de l’autre comme la vôtre. Je veux que nous pensions au projet de développement humain intégral auquel nous aspirons, fondé sur le rôle central des peuples dans toute leur diversité et sur l’accès universel aux trois T que vous défendez : terre, toit et travail. J’espère que cette période de danger nous fera abandonner le pilotage automatique, secouera nos consciences endormies et permettra une conversion humaniste et écologique pour mettre fin à l’idolâtrie de l’argent et pour placer la dignité et la vie au centre de l’existence. Notre civilisation, si compétitive et individualiste, avec ses rythmes frénétiques de production et de consommation, ses luxes excessifs et des profits démesurés pour quelques-uns, doit être freinée, se repenser, se régénérer. Vous êtes des bâtisseurs indispensables à ce changement inéluctable. Je dirais même plus, vous avez une voix qualifiée pour témoigner que cela est possible. Vous connaissez bien les crises et les privations… que vous parvenez à transformer avec pudeur, dignité, engagement, effort et solidarité, en promesse de vie pour vos familles et vos communautés.

Continuez à lutter et à prendre soin de chacun de vous comme des frères et sœurs. Je prie pour vous, je prie avec vous et je demande à Dieu, notre Père, de vous bénir, de vous combler de son amour et de vous protéger sur ce chemin, en vous donnant la force qui nous permet de rester debout et qui ne nous déçoit pas : l’espoir. Veuillez aussi prier pour moi, car j’en ai besoin.

Fraternellement,

François

Cité du Vatican, dimanche de Pâques, le 12 avril 2020




Rameaux 2020

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? J’ai beau rugir, mon salut reste loin » (Psaume 22 (21))

Nous rentrons dans la semaine liturgique, la semaine « sainte », où tout bascule.

Bascule

Jésus monte avec ses disciples, à Jérusalem, le cœur des pouvoirs politiques et religieux. La rumeur de la venue de cet homme qui a marqué les esprits en Galilée par son enseignement et ses guérisons soulevait de nombreux espoirs dans toute la Palestine. Son arrivée commence plutôt bien, il obtient un réel succès populaire; car nombreux sont ceux qui voient en lui le personnage que tout le monde attend, le messie.

A dire vrai, le profil de ce messie, de ce nouveau roi, n’est pas trop bien défini. On ne sait ni quand ni comment il va se manifester. Tous mettent en lui beaucoup d’espoirs. Certains  attendent de lui qu’il prenne la tête d’un mouvement de libération nationale, qu’il assure la défaite de l’occupant et qu’il rassemble tout le peuple dispersé, quitte même, pour certains, les zélotes, à déroger ponctuellement à la Torah en prenant les armes. D’autres, les malades, les plus pauvres attendent un changement radical de leurs conditions. Les plus religieux, surtout, attendent une manifestation éclatante de Dieu afin que la Torah s’impose au monde entier, ce qui les conforterait dans leur croyance (et peut-être, par la même occasion, dans leurs pouvoirs!). Pour ces derniers  la notoriété montante de Jésus agace car il prend vraiment trop de liberté par rapport aux règles sacrées de la Loi et semble faire fi de leur autorité.

Bénéficiant d’un large soutien populaire, Jésus pouvait faire une entrée triomphale et s’imposer ainsi à ses opposants. Curieux détails, cette arrivée à Jérusalem, Jésus l’a voulu montée sur un âne, ce qui n’est pas, a priori, la façon la plus spectaculaire de manifester sa puissance.
Cependant les plus instruits des textes de la Bible ont peut-être fait le rapprochement avec un passage d’un des derniers prophètes, Zacharie, qui a annoncé, vers 530 av jc, le retour de captivité à Babylone ainsi :

« Tressaille d’allégresse, fille de Sion ! Pousse des acclamations, fille de Jérusalem ! Voici que ton roi s’avance vers toi ; il est juste et victorieux, humble, monté sur un âne– sur un ânon tout jeune (Za 9,9)

Cette allusion à l’humilité de ce roi-messie ne coïncidait sans doute pas avec les attentes d’un peuple déjà par trop humilié, par l’exil à Babylone, suivi de l’occupation par les grecques, puis par les romains.

Guérison

Dans les jours qui suivent cette entrée « triomphale », Jésus poursuit son enseignement en plein centre-ville, près du temple et même dans le temple au nez et à la barbe des «gardiens du temple ». Il pousse le bouchon jusqu’à renverser les étals des commerçants installés sur le parvis pour faire du business, puis il guérit les aveugles et les boiteux qui étaient là, devant, à mendier. On voit que l’humilité dont il a fait preuve à son arrivée n’entrave pas son audace. Visiblement pour lui humilité ne rime pas avec soumission et encore moins avec peur du conflit. L’irritation de ses opposants ne pouvait qu’enfler, mais comme ils ne peuvent  pas trop s’opposer directement à lui à cause de son soutien populaire, ils le harcèlent de questions théologiques piégeuses et cherchent à saper son autorité  « En vertu de quelle autorité fais-tu cela ? Et qui t’a donné cette autorité ? » (Mt 21,23)

Finalement dans cette sourde bataille, il va être trahi par un de ses amis, celui qui détenait la bourse du groupe et qui en profitait pour s’en mettre un peu de côté. Sans doute aussi, Judas, était-t’ il déçu par ce Jésus dont il espérait qu’il prendrait la tête d’une insurrection populaire, il aurait pu ainsi tenir une place importante dans ce nouveau pouvoir.Toujours est-il qu’il va vendre des informations aux autorités pour leur permettre de s’emparer de Jésus la nuit, loin de la foule et d’expédier dans la foulée un pseudo-procès pour se débarrasser définitivement de cet homme décidément très encombrant.
Cette arrestation et l’apparente incapacité de Jésus à se défendre ruinent alors tous les espoirs mis sur lui par la foule. Cette déception fait tout basculer, le retournement de la foule est à la hauteur des espoirs déçus. Sa comparution immédiate s’accompagne de plaisanteries sadiques de la part des gardes qui tournent en dérision son pseudo statut de roi que lui avait donné la foule peu de jours auparavant. Jésus accepte tout cela en silence. Peut-être avait-il en tête ce texte d’Esaïe :

«  Le Seigneur DIEU m’a donné une langue de disciple :
pour que je sache soulager l’affaibli, il fait surgir une parole.
Matin après matin, il me fait dresser l’oreille, pour que j’écoute, comme les disciples.
Le Seigneur DIEU m’a ouvert l’oreille.
Et moi, je ne me suis pas cabré, je ne me suis pas rejeté en arrière.
J’ai livré mon dos à ceux qui me frappaient, mes joues, à ceux qui m’arrachaient la barbe ;
je n’ai pas caché mon visage face aux outrages et aux crachats.
C’est que le Seigneur DIEU me vient en aide :
dès lors je ne cède pas aux outrages, dès lors j’ai rendu mon visage dur comme un silex,
j’ai su que je n’éprouverais pas de honte.
Il est proche, celui qui me justifie !
Qui veut me quereller ? Comparaissons ensemble !
Qui sera mon adversaire en jugement ?  Qu’il s’avance vers moi !
Oui, le Seigneur DIEU me vient en aide : qui donc me convaincrait de culpabilité » (Es 50,4-9) 

Mais là Jésus descend encore plus bas, beaucoup plus bas. Celui qu’il appelle son Père ne répond plus. A l’humiliation d’être traité comme un rebut de l’humanité succède le supplice aussi infamant que douloureux de la crucifixion. Alors il crie : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

C’est le premier verset du psaume 22. Certainement il le connaissait par cœur, alors lisons avec lui la suite, peut-être n’a-t-il pas pu le réciter jusqu’au bout, ou bien a-t-il « rendu l’esprit » seulement après la finale de ce psaume :

«J’ai beau rugir, mon salut reste loin.
Le jour, j’appelle, et tu ne réponds pas, mon Dieu ; la nuit, et je ne trouve pas le repos.
Pourtant tu es le Saint : tu trônes, toi la louange d’Israël !
Nos pères comptaient sur toi ; ils comptaient sur toi, et tu les libérais.
Ils criaient vers toi, et ils étaient délivrés ; ils comptaient sur toi, et ils n’étaient pas déçus.
Mais moi, je suis un ver et non plus un homme, injurié par les gens, rejeté par le peuple.
Tous ceux qui me voient me raillent ; ils ricanent et hochent la tête :
« Tourne-toi vers le SEIGNEUR ! Qu’il le libère, qu’il le délivre, puisqu’il l’aime !

Comme l’eau je m’écoule ; tous mes membres se disloquent.
Mon cœur est pareil à la cire, il fond dans mes entrailles

ils m’ont percé les mains et les pieds.
Je peux compter tous mes os ; des gens me voient, ils me regardent.
Ils se partagent mes vêtements et tirent au sort mes habits.
Mais toi, SEIGNEUR, ne reste pas si loin ! O ma force, à l’aide ! Fais vite !
..
Tu m’as répondu !  je vais redire ton nom à mes frères et te louer en pleine assemblée :
Vous qui craignez le SEIGNEUR, louez-le ! Vous tous, race de Jacob, glorifiez-le !
Vous tous, race d’Israël, redoutez-le !
Il n’a pas rejeté ni réprouvé un malheureux dans la misère ;
il ne lui a pas caché sa face ;  il a écouté quand il criait vers lui.

Les humbles mangent à satiété ;
ils louent le SEIGNEUR, ceux qui cherchent le SEIGNEUR : « A vous, longue et heureuse vie ! »
La terre tout entière se souviendra et reviendra vers le SEIGNEUR »

Entre le début et la fin du psaume que s’est–il passé dans l’esprit du psalmiste et de Jésus ?
Quel est ce trou noir, ce passage de la mort à la vie ?

Quelques années plus tard, Paul consacrera toute son énergie et son talent à transmettre la portée universelle de cette Pâque. Dans une lettre à la petite communauté de la ville de Philippes, il écrit :

«  Ayez un même amour, un même cœur ; recherchez l’unité ; ne faites rien par rivalité, rien par gloriole, mais, avec humilité, considérez les autres comme supérieurs à vous. Que chacun ne regarde pas à soi seulement, mais aussi aux autres. Comportez-vous ainsi entre vous, comme on le fait en Jésus Christ : lui qui est de condition divine n’a pas considéré comme une proie à saisir d’être l’égal de Dieu. Mais il s’est dépouillé, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes, et, reconnu à son aspect comme un homme il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, à la mort sur une croix. C’est pourquoi Dieu l’a souverainement élevé et lui a conféré le Nom qui est au-dessus de tout nom » (Phil 2,2)




Prière et méditation

Cher.e.s ami.e.s,
Nous vivons des moments exceptionnels et bouleversés.
Ensemble pour ceux qui le désirent, relions nous chaque jour par une prière ou une méditation, pour se soutenir les uns les autres.
A 9 h soyons tous en communion
Nous vous invitons a partager cette initiative avec vos amis.
Affectueusement
Michèle G et Françoise M

PS retrouver des liens susceptibles de vous intéresser :

La lecture biblique au quotidien

https://levangileauquotidien.org/FR/gospel

Ou

https://www.aelf.org/2020-03-17/romain/messe#messe1_lecture3

un article sur méditation et prière, avec Jean-Guilhem Xerri

https://fr.aleteia.org/2019/07/07/yoga-meditation-pleine-conscience-un-rapport-avec-dieu/

Un extrait de video de Denis  Marquet sur la prière,

 




mise en ligne 2ème épitre aux corinthiens

Vous retrouverez les commentaires en cliquant sur

http://lecturedelabible.fr/deuxieme-epitre-aux-corinthiens/




Pâques 2019

L’incendie de la cathédrale Notre-Dame, événement inouï, imprévisible, nous a tous sidérés.
L’ampleur des réactions, l’émotion exprimée partout dans le monde nous interroge sur la valeur symbolique d’un tel bâtiment.
Par ailleurs, il n’est pas anodin de constater que cet événement eut lieu lors de la semaine sainte, semaine où Jésus est arrêté et mis à mort, justement pour ses propos tenus sur le temple, paroles perçues comme blasphématoires par les autorités religieuses.
Pour approfondir le sens de nos réactions affectives à cet événement, je vous propose d’en partager toutes les fortes résonances bibliques.
En effet ce thème du temple est central dans ce millénaire où toute la révélation biblique s’est déployée :
– sa construction (10ème siècle av jc sous le roi Salomon)
– ses deux destructions (la 1ère en 587 av jc, la 2ème en 70 ap jc)
– enfin l’avènement d’un temple spirituel, universel appelé à rassembler l’humanité.

La Construction du Temple

Le roi David (cf les livres de Samuel) qui après s’être construit un palais émet le projet de construire un temple pour son Dieu, Yhwh. Lieu qui à l’instar des peuples environnants a pour objectif de fédérer tout un peuple autour d’un culte.
Ce projet n’est pas agréé par Yhwh, mais c’est Yhwh qui donne une maisonnée (une dynastie) à David.
« Yhwh te fera une maison. Lorsque tes jours seront accomplis et que tu seras couché avec tes pères, j’élèverai ta descendance après toi, celui qui sera issu de toi-même, et j’établirai fermement sa royauté. C’est lui qui bâtira une Maison pour mon Nom. « (2 Sm 7,11-13)

C’est son fils Salomon qui devra construire le temple à Jérusalem. Dans une belle prière lors de la dédicace du temple, Salomon reconnait que le Dieu créateur ne peut être enfermé dans un lieu aussi beau soit-il,
« Est-ce que vraiment Dieu pourrait habiter sur la terre ? Les cieux eux-mêmes et les cieux des cieux ne peuvent te contenir! Combien moins cette Maison que j’ai bâtie ! » (1 R 8,27)
Mais ce temple sera un lieu de pèlerinage et de rassemblement de tout le peuple, il est la réplique du palais céleste.
Certains psaumes traduisent l’amour touchant du peuple pour ce lieu:
« Comme elles sont aimées, tes demeures,Yhwh de l’univers ». (Ps 84,1)

La première destruction.

Le Temple de Jérusalem, pilier de l’identité du peuple d’Israël et signe de la présence de Dieu à leur côté, est détruit en 587 av. J.C. et le peuple déporté à Babylone.
Les prophètes ont montré toute l’ambiguïté de cet attachement au temple. Ils dénoncent cette confiance superstitieuse au temple qui s’exerce au détriment de l’exercice de la justice :
« Améliorez votre conduite, votre manière d’agir, pour que je puisse habiter avec vous en ce lieu.  Ne vous bercez pas de paroles illusoires en répétant « Palais du Yhwh ! Palais du Yhwh ! Palais du Yhwh ! Il est ici. »  Mais plutôt amendez sérieusement votre conduite, votre manière d’agir, en défendant activement le droit dans la vie sociale ; n’exploitez pas l’immigré, l’orphelin et la veuve … je pourrai alors habiter avec vous en ce lieu… Mais vous vous bercez de paroles illusoires qui ne servent à rien.  Pouvez-vous donc commettre le rapt, le meurtre, l’adultère, prêter de faux serments, … puis venir vous présenter devant moi dans cette Maison sur laquelle mon nom a été proclamé et dire : « Nous sommes sauvés ! » et puis continuer à commettre toutes ces horreurs ?  Cette Maison sur laquelle mon nom a été proclamé, la prenez-vous  donc pour une caverne de bandits. (Jr 7,3 +)

Sous l’action des prophètes va s’opérer une métamorphose dans  la perception qu’aura le peuple  de son identité. Dépossédé de lieu de culte, progressivement le socle de cette identité glissera d’une pratique cultuelle à l’étude de la Tora (la Parole, la Loi, l’Enseignement) et donnera naissance au Judaïsme.
Néanmoins au retour de captivité en 535, la reconstruction du temple fut entreprise et ce nouveau temple est inauguré en 515.

Beaucoup plus tard, 500 ans après, Hérode le Grand entreprit une extension très importante quelques années avant la naissance de Jésus.

 La seconde destruction

Jésus revendique ce temple comme « la maison de son Père » et constatant les trafics autour du temple, il se met en colère :
« Il trouva dans le temple les marchands de bœufs, de brebis et de colombes ainsi que les changeurs qui s’y étaient installés.  Alors, s’étant fait un fouet avec des cordes, il les chassa tous du temple, et les brebis et les bœufs ; il dispersa la monnaie des changeurs, renversa leurs tables »
Puis comme Jérémie cité plus haut «  il dit aux marchands de colombes : « Otez tout cela d’ici et ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. »(Jn 2,14).

Plus tard, quand ses disciples lui montrent les merveilles de cette construction, Jésus annonce une nouvelle catastrophe :
«  Comme quelques-uns parlaient du temple, de son ornementation de belles pierres et d’ex-voto, Jésus dit : « Ce que vous contemplez, des jours vont venir où il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit » ». (Lc 21,5)
Alors dans une phrase très énigmatique Jésus annonce qu’à la destruction matérielle du temple succédera une construction nouvelle en très peu de temps :
 « Jésus leur répondit : « Détruisez ce temple et, en trois jours, je le relèverai. »  Alors ces Juifs lui dirent : « Il a fallu quarante-six ans pour construire ce temple et toi, tu le relèverais en trois jours ? »  Mais lui parlait du temple de son corps.  Aussi, lorsque Jésus se releva d’entre les morts, ses disciples se souvinrent qu’il avait parlé ainsi, et ils crurent à l’Ecriture ainsi qu’à la parole qu’il avait dite. » (Jn2,19)

Cette phrase sur la destruction du temple, déformée lors de son procès, sera formellement le motif de sa condamnation à mort :
« Or les grands prêtres et tout le Sanhédrin cherchaient un faux témoignage contre Jésus pour le faire condamner à mort ;  ils n’en trouvèrent pas, bien que beaucoup de faux témoins se fussent présentés. Finalement il s’en présenta deux qui  déclarèrent : « Cet homme a dit : “Je peux détruire le sanctuaire de Dieu et le rebâtir en trois jours.” » Le Grand Prêtre se leva et lui dit : « Tu n’as rien à répondre ? De quoi ces gens témoignent-ils contre toi ? »  Mais Jésus gardait le silence.» (Mt 26,61)

En réalité, Jésus n’avait pas dit qu’il détruirait le temple mais… qu’il sera détruit :
Cette phrase lui vaudra moqueries et insultes pendant son ‘chemin de croix’ : «  Les passants l’insultaient, hochant la tête et disant : « Toi qui détruis le sanctuaire et le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même, si tu es le Fils de Dieu, et descends de la croix ! » (Mt 27,39)
Mais avant de mourir, Jésus avait annoncé à ses disciples que cette destruction prochaine du temple était un signe symbolique annonçant la fin des temps et le chapitre 24 de l’évangile de Matthieu exhorte ses disciples à tenir bon dans cette apocalypse (apocalypse = révélation finale) avec la promesse d’une nouvelle naissance dans la douleur.
« Comme il était assis, au mont des Oliviers, les disciples s’avancèrent vers lui, à l’écart, et lui dirent : « Dis-nous quand cela arrivera, et quel sera le signe de ton avènement et de la fin du monde. 
Jésus leur répondit : « Prenez garde que personne ne vous égare. Car beaucoup viendront en prenant mon nom ; ils diront : “C’est moi, le Messie”, et ils égareront bien des gens.  Vous allez entendre parler de guerres et de rumeurs de guerre. Attention ! Ne vous alarmez pas : il faut que cela arrive, mais ce n’est pas encore la fin.  Car on se dressera nation contre nation et royaume contre royaume ; il y aura en divers endroits des famines et des tremblements de terre. Et tout cela sera le commencement des douleurs de l’enfantement. Alors on vous livrera à la détresse, on vous tuera, vous serez haïs… ils se livreront les uns les autres, ils se haïront entre eux.  Des faux prophètes  surgiront en foule et égareront beaucoup d’hommes.  Par suite de l’iniquité croissante, l’amour du grand nombre se refroidira ;  mais celui qui tiendra jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé. Cette Bonne Nouvelle du Royaume sera proclamée dans le monde entier …. Et alors viendra la fin. »

Le temple est détruit pas les romains en 70.

Construction d’un Temple, non plus de pierre mais de chair.

La résurrection du Christ le troisième jour après sa mort éclaire l’énigme de la reconstruction du temple en trois jours. C’est le Christ ressuscité en chair et en os qui est le véritable temple. L’ambigüité du temple de pierre est levée, il trouve son véritable sens dans la résurrection à laquelle chacun de nous est appelé personnellement.
« Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous ?  Si quelqu’un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira. Car le temple de Dieu est saint, et ce temple, c’est vous. » (1Co 3,16).

Ce qui est sacré n’est plus un bâtiment de pierre, mais chaque personne prise individuellement.
Ce temple rassemble tous les membres en un seul corps, un corps universel :
« En effet, comme nous avons plusieurs membres en un seul corps et que ces membres n’ont pas tous la même fonction,  ainsi, à plusieurs, nous sommes un seul corps en Christ, étant tous membres les uns des autres, chacun pour sa part » (Rm 12,4)

La tête de ce corps est le Christ :
« C’est lui, en effet, qui est notre paix : de ce qui était divisé, il a fait une unité. Dans sa chair, il a détruit le mur de séparation : la haine. Il a aboli la loi et ses commandements avec leurs observances. Il a voulu ainsi, à partir du Juif et du païen, créer en lui un seul homme nouveau, en établissant la paix, et les réconcilier avec Dieu tous les deux en un seul corps, au moyen de la croix : là, il a tué la haine.  Il est venu annoncer la paix à vous qui étiez loin, et la paix à ceux qui étaient proches. Et c’est grâce à lui que les uns et les autres, dans un seul Esprit, nous avons l’accès auprès du Père. Ainsi, vous n’êtes plus des étrangers, ni des émigrés ; vous êtes concitoyens des saints, vous êtes de la famille de Dieu.  Vous avez été intégrés dans la construction qui a pour fondation les apôtres et les prophètes, et Jésus Christ lui-même comme pierre maîtresse. C’est en lui que toute construction s’ajuste et s’élève pour former un temple saint dans le Seigneur. C’est en lui que, vous aussi, vous êtes ensemble intégrés à la construction pour devenir une demeure de Dieu par l’Esprit » (Eph 2, 14-22)

Que de ce drame de l’incendie de Notre-Dame naisse une prise de conscience collective!

Qu’il nous aide à dépasser toutes nos appartenances ethniques, politiques, sociales ou religieuses, pour ne faire qu’un seul corps avec toutes nos diversités!




Dimanche 24 mars 2019

Dimanche dernier, nous avons donc échangé sur les trois textes de la liturgie du jour (3ième dimanche du carême 2019) et tenter de dégager les éclairages que chacun de ces textes portent sur les deux autres:

Exode 3 (le buisson ardent)

Dans ce premier texte de l’appel de Moïse du buisson qui brûle sans se consumer, c’est la révélation d’un dieu qui entend, qui voit et qui connait notre souffrance. C’est en s’appuyant sur cette expérience que nous pouvons construire notre foi. Face à cette souffrance de son peuple, Dieu intervient et révèle à Moïse son NOM. Cet engagement de Dieu appelle de notre part une réponse (donc une responsabilité). Vous pouvez retrouver plus de commentaire sur le site :

http://bible2.falguerolles.org/introduction-au-livre-de-lexode/exode-1-15-moise-les-chemins-de-la-liberte/#Lappel_de_Dieu_a_Moise_au_buisson_ardent_Ex_3_1-10

Puis nous avons échangé sur l’articulation de ces trois mots : liberté/ responsabilité /culpabilité.

1 Corinthiens 10

Paul en s’adressant à la communauté naissante située à Corinthe (ville portuaire connue pour ses mœurs assez dépravés) prend exemple sur certains passages de ce livre de l’Exode pour illustrer le soutien du Christ (notre rocher) qui nous guide (la nuée) et nous alimente à travers nos difficultés (la manne et la source qui jaillit du rocher dans le désert), mais aussi la responsabilité de chacun pendant ce difficile chemin de liberté semé d’embûches…Ces avertissements de Paul peuvent avoir un caractère un peu inquiétant… mais Dieu est patient et fidèle:
« Les tentations auxquelles vous avez été exposés ont été à la mesure de l’homme, Dieu est fidèle ; il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces. Avec la tentation, il vous donnera le moyen d’en sortir et la force de la supporter »

 Luc 13 ,1-9

La première partie de ce passage est assez déroutante et paradoxale, car d’une part il nous dit que les malheurs qui arrivent à certaines personnes ne sont pas liés à des péchés qu’ils auraient commis et que d’autre part si nous ne tournons pas notre regard vers Dieu (conversion), nous subirons ce type de malheur … C’est là aussi un avertissement inquiétant:
« Non, je vous le dis, mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même »
mais …la deuxième partie avec la parabole du figuier stérile met en scène deux personnages autour de cet arbre planté au milieu de la vigne (la vigne représentant traditionnellement le peuple d’Israël, c’est-à-dire chacun de nous): le propriétaire qui veut abattre ce figuier stérile et inutile et le vigneron qui, lui, demande au propriétaire de faire preuve de patience. Il promet au propriétaire de s’en occuper pour qu’il donne enfin du fruit. Ces deux personnages, le maître et le vigneron sont les deux facettes de Dieu tel que nous pouvons nous le représenter. Mais en final, face à la stérilité des hommes, c’est la patience de Dieu, le Dieu vigneron, qui l’emportera sur le Dieu maître. Notre conversion, c’est aussi changer notre représentation d’un Dieu punisseur et croire que le dessein de Dieu est infiniment patient et bienveillant (…mais sans rien laisser passer !).

Nous avons clôturé la matinée par la prière du psaume 102 (103) :
« JE SUIS tendresse et pitié, lent à la colère et plein de fidélité »

Dieu est cette flamme au milieu de nous




Noël 2018: Tenons bon!

Ce message est toujours d’actualité:

http://bible2.falguerolles.org/message-de-noel-2017/

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dernière publication: chapitre 13 de Matthieu

Vous trouverez les commentaires sur les paraboles au chapitre 13 de l’évangile de Matthieu, en cliquant sur le lien suivant:

http://lecturedelabible.fr/evangile-de-matthieu/matthieu-13/

Dans ces commentaires, deux thèmes particuliers ont été développés:

  • le thème de la révélation biblique
  • le thème des enfers

 




dernière publication sur le deutéronome

Une deuxième partie des commentaires du livre du Deutéronome vient d’être réécrite sur les chapitres 12 à 34.
Vous y trouverez en particulier l’évolution de la perception de la Loi, entre contrainte imposée de l’extérieur et nourriture reçue à l’intérieur.
A découvrir en cliquant sur:

http://lecturedelabible.fr/le-deuteronome/deuteronome-12-34/

La première partie a été remaniée et le chapitre 11 y a été inséré!
Le thème de « la crainte de Yhvh » y est développé.